Depuis le 1er juillet 2025, la procédure de saisie des rémunérations a été modifiée en profondeur.
Initiée par la loi d’orientation et de programmation du ministère de la justice du 20 novembre 2023 et précisée par le décret du 12 février 2025, cette réforme vise à simplifier et moderniser une procédure jusqu’ici largement encadrée par l’intervention du juge.
Désormais, ce sont les commissaires de justice (ex-huissiers de justice et commissaires-priseurs judiciaires) qui deviennent les interlocuteurs principaux dans ce processus de recouvrement de créances, avec des conséquences pratiques importantes pour les employeurs.
De nouveaux interlocuteurs pour les employeurs
Jusqu’à présent, la saisie des rémunérations nécessitait l’autorisation préalable du juge de l’exécution, délivrée à l’issue d’une tentative de conciliation entre le créancier et le salarié débiteur.
À partir du 1er juillet 2025, cette étape judiciaire est supprimée. Le commissaire de justice peut initier directement la procédure de saisie, en signifiant au salarié un commandement de payer.
Ce dernier dispose alors d’un mois pour s’acquitter de sa dette ou proposer un accord amiable.
En cas d’échec, un procès-verbal de saisie est ensuite adressé à l’employeur dans les 3 mois après la délivrance du commandement de payer. Le PV de saisie devra être accompagné d’un certificat qui aura été établi par le commissaire de justice. Celui-ci vient attester que le salarié n’a pas formé de contestation dans le mois suivant la notification du commandement de payer.
Cette réforme vise à désengorger les tribunaux et à accélérer le traitement des dossiers, tout en maintenant un contrôle judiciaire en cas de contestation. Le juge de l’exécution n’interviendra plus qu’en aval, en cas de litige sur la mesure de saisie.
Un nouveau rôle pour les employeurs
L’entrée en vigueur de la réforme modifie profondément les obligations des employeurs tiers saisis.
Versement des sommes au commissaire de justice répartiteur
Tout d’abord, les employeurs ne devront plus verser les sommes retenues au greffe du tribunal judiciaire, comme c’était le cas auparavant.
Ces montants devront désormais être transmis mensuellement directement au commissaire de justice répartiteur, désigné par la chambre nationale des commissaires de justice.
Ce dernier assurera également la répartition des fonds entre les éventuels créanciers multiples, ainsi que le contrôle du respect des barèmes de quotité saisissable.
Informations à transmettre au créancier et au commissaire de justice
Par ailleurs, l’employeur, en tant que tiers saisi, est tenu de transmettre au créancier certaines informations, à condition qu’elles soient strictement nécessaires à l’exécution de la saisie.
Il devra ainsi :
- Indiquer la nature de la relation contractuelle qui le lie au salarié concerné, ainsi que – nouveauté introduite par la réforme – le montant de la rémunération versée à ce dernier
- signaler l’existence d’éventuelles cessions de salaire, saisies en cours, saisies administratives à tiers détenteur ou encore paiements directs liés à des pensions alimentaires.
Ces mêmes informations devront impérativement être communiquées au commissaire de justice répartiteur dans un délai de 15 jours suivant la notification de l’acte de saisie. Cette transmission devra inclure, en particulier, le montant exact de la rémunération à verser au salarié débiteur pour le mois suivant la notification, afin de permettre un calcul précis des sommes saisissables.
L’employeur devra informer le commissaire de justice répartiteur de tout évènement mettant fin ou suspendant la saisie dans les 8 jours suivant l’évènement.
Création d’un registre numérique national
Pour garantir une meilleure traçabilité, chaque acte de procédure devra être inscrit dans un registre numérique national, mis en place sous l’égide de la chambre nationale des commissaires de justice.
L’employeur n’aura pas accès à ce registre.
Autre nouveauté : le commissaire de justice devra transmettre à l’employeur tous les documents de saisie
- soit par voie électronique via le site sécurisé Securact,
- soit en personne, muni de sa carte professionnelle.
L’authenticité des actes et l’identité de leur auteur sont ainsi garanties.
Quid des procédures en cours au 1er juillet 2025 ?
La réforme prévoit un régime transitoire pour les procédures de saisie déjà engagées avant le 1er juillet 2025.
À cette date, toutes les saisies en cours seront suspendues, et les greffes des tribunaux judiciaires transmettront les dossiers aux commissaires de justice compétents.
Le créancier aura alors un délai de trois mois pour confirmer sa volonté de poursuivre la procédure selon les nouvelles règles. Passé ce délai, la saisie deviendra caduque. En attendant cette reprise, l’employeur devra cesser toute retenue sur salaire et verser l’intégralité de la rémunération au salarié concerné.
Il est important de noter que les cessions volontaires de rémunération, qui permettent au salarié de céder directement une part de son salaire à un créancier, ne sont pas concernées par la réforme et continueront de s’appliquer selon le régime antérieur.
Une réforme qui laisse inchangées certaines garanties
Malgré ces bouleversements procéduraux, certaines règles fondamentales demeurent inchangées.
La fraction insaisissable du salaire, équivalente au montant du RSA pour une personne seule, est maintenue, tout comme le barème de la quotité saisissable.
De même, les saisies conservatoires restent interdites sur les rémunérations.
Enfin, les frais liés à l’intervention du commissaire de justice ne sont pas à la charge de l’employeur. Ceux-ci sont prélevés sur les sommes saisies, dans le respect du cadre légal.
Et si l’employeur ne respecte pas ses obligations ?
L’employeur qui n’applique pas les retenues sur salaire au titre de la saisie pourra être condamné au paiement de ces sommes.